Parenthèse enchantée en Normandie à l’hôtel la Chaumière

Niché au creux d’un vallon au bord de la mer, l’Hôtel La Chaumière se découvre en contrebas de l’étroite route de la côte qui serpente joyeusement entre Deauville et Honfleur. Un peu en retrait, deux longs rectangles d’ardoise invitent à prendre le chemin qui dégringole entre prairies ondoyantes et nature subtilement aménagée jusqu’à la belle demeure XVIIIe siècle d’un authentique cachet.

L’exceptionnelle situation de l’Hôtel La Chaumière entre mer et jardins s’embrasse d’un coup d’œil. En montant les quelques marches qui mènent à la réception, on est surpris par la présence tout à fait inattendue en plein bocage normand d’un grand mur d’eau avec bassin 16/9° et d’un jardin zen. Comme si un message subliminal était envoyé à l’hôte : déposez les bagages à la réception, lâchez prise, abandonnez-vous à la sérénité des lieux.

Et de fait, un phénomène étrange se passe : la chambre n’est pas tout à fait prête ? Pas d’énervement, profitons-en pour prendre le Tweezy de l’hôtel et se balader par les petits chemins jusqu’à la Chapelle Notre Dame de Grâce (16°siècle). Les marins et bourgeois de Honfleur l’ont construite à la place d’une ancienne Chapelle fondée par le Duc de Normandie Richard II pour accomplir un vœu fait au cours d’une tempête où il avait failli périr. C’est un véritable bijou. A droite d’une petite nef richement colorée, deux transepts : celui de gauche représente les colons normands partis s’établir au Canada, celui de droite est dédié à Ste Thérèse de l’Enfant-Jésus. Plaques de marbre et tableaux perpétuent le souvenir de personnages illustres venus se recueillir : Samuel de Champlain, Pierre Berthelot, Louis XIII, Bonaparte, Thérèse de Lisieux… L’ensemble des ex-voto marins est exceptionnel. Devant les orgues se balance un petit voilier au gréement aurique. Un oratorio tout au bout d’une allée d’arbres séculaires fait face à la Chapelle. Il se dégage de ce lieu une telle sérénité, une telle paix, qu’on en oublierait presque de rentrer ! Mais il est temps de découvrir la Suite aménagée tout en haut du parc dans l’ancienne bergerie de La Chaumière. Sur le mur extérieur, on remarque tout de suite le signe l’infini incrusté dans les moellons… Au rez-de-chaussée, sur l’un des murs lambrissés couleur taupe, une majestueuse tête d’élan du Canada en feutrine semble souhaiter la bienvenue. La décoration épurée mélange harmonieusement pierre, ardoise et par dessus tout le bois. En enfilade du salon, telle une œuvre d’art posée au sol, une baignoire -Tadelakt intérieur noir, extérieur en peau de vache normande- donne sur la prairie et intègre la nature sauvage dans l’habitat. Ensuite une salle de bains en béton ciré gris soutenu, une vasque noire posée sur un plan assorti aux murs et une grande douche à l’italienne intégrée dans des pierres mordorées. L’ensemble est d’un luxe discret. En mezzanine, on est saisi par la beauté d’un immense triangle isocèle vitré qui embrasse ciel, jardin et mer. Véritable tableau qui change selon les heures et la couleur du ciel ! Du lit, recouvert de lin blanc cassé, on peut apercevoir quelques bateaux de pêche à moteur, des tankers à marche forcée, et dans la brume lointaine la silhouette des grues du Havre. En face, le mur composé en partie d’une accumulation de rondins de bois disposés en trigone accentue la chaleur de l’ensemble et répond au triangle vitré. Ici tout est pensé pour créer bien-être et harmonie.

Le temps d’un bain de soleil sur la terrasse privée, direction le restaurant où officie le Chef Gérard Bonnefoy. Dans la salle à manger aux poutres d’époque et tomettes anciennes, l’élégante décoration associe les colombages aux teintes contemporaines acier, les tables noires aux confortables fauteuils et assises couleur taupe. Ici toutes les fenêtres ouvertes sur mer et nature donnent à voir un jardin graphique, un chemin qui s’enfuit jusqu’à la plage, des silhouettes de vaches en fer vieilli… Et l’on ne sait plus s’il faut regarder le jour qui s’étire sous un ciel diapré de teintes roses orangées ou admirer la composition artistique des plats qui se succèdent. Sans parler de l’émotion gustative qui s’empare du palais ! Les huîtres creuses élevées par l’ostréiculteur Patrick Liron au rythme des marées normandes -les plus fortes d’Europe- sont d’une fraîcheur marine inouïe tandis que le « Camembert rôti au caramel poivré » -à marquer d’une pierre blanche- marie des saveurs qui claquent en bouche.
Le Chef Gérard Bonnefoy propose une cuisine subtile, inventive, généreuse et fait la part belle aux produits locaux de saison. Originaire du Cotentin, Gérard Bonnefoy a été Chef étoilé Michelin pendant 26 ans à l’Auberge normande à Carentan puis à Honfleur à l’Assiette Gourmande. Aux commandes des fourneaux de La Chaumière depuis décembre 2012, il ne cesse d’innover en réinterprétant d’anciennes recettes comme les « Fraises pour Nelly Melba, façon Chaumière » en hommage au Chef Escoffier qui l’avait créée en l’honneur de la diva colorature Nelly Melba, triomphale dans Lohengrin (1893).
A La Chaumière, tout n’est que luxe sans ostentation, et c’est certainement dû à la personnalité de sa propriétaire, Marie Pier Boelen. C’est elle qui a conçu la rénovation il y a deux ans en pensant l’ensemble dans les moindres détails. Les chambres, toutes spacieuses, raffinées et différentes sont tantôt classiques avec des meubles anciens et salles de bains en marbre, tantôt contemporaines avec lignes épurées, salles de bains ouvertes, baignoire à chromothérapie, grandes douches à l’italienne. Si Marie Pier Boelen bénéficie d’une longue tradition familiale dans l’hôtellerie, elle a mis beaucoup de son cœur et de sa philosophie de vie dans sa demeure, entre tradition et modernité.
Le soleil radieux invite à faire un tour à Honfleur tout proche. Direction CAP 42, un charmant restaurant au bord du vieux bassin. On aperçoit au loin les splendides gréements de l’Armada de la Liberté qui se dirigent vers Rouen. Tout près, des crevettiers attendent la marée et dessinent, avec les façades recouvertes d’ardoise des maisons, une véritable carte postale. Un tour-incontournable !-au Musée Eugène Boudin, quelques emplettes de produits locaux, une promenade dans les ruelles étroites et pavées, vite l’Hôtel La Chaumière nous attend pour profiter des derniers feux du soleil sur la grande terrasse herbée, et boire un verre dans les longs canapés blancs aux coussins gris pâle. Çà et là Marie-Pier Boelen a disposé des châles assortis rose poudré à l’attention des hôtes frileux.
Le lendemain, en traversant le parc de La Chaumière en direction de la plage privée, on est irrémédiablement attiré par l’alternance de carrés sauvages plantés d’œuvres modernes au milieu d’espaces tondus. Sur le chemin ponctué de grosses boules blanches, un minuscule ruisseau, des ponts de bois, de loin en loin des duos de transats dans leur carré privé, une cabane de plage, des kayaks, quelques tables pour pique-niquer… La Chaumière recèle de bien de trésors !
Et l’on se prend à rêver de revenir sous un soleil estival pour les découvrir tous, ou sous une pluie battante pour se blottir près de la cheminée du salon avec une tasse de thé accompagnée de sa brioche tiède et de confitures de fruits du jardin…Et pourquoi pas ? Sous une neige épaisse qui inciterait à hiberner pour ne plus repartir.

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Crédit Photos : La Chaumière 

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